Journal de la Senne n° 29 | décembre 2022
   
  Le bassin Béco: un passé iconique, un futur glamour?

Que dire encore à propos du bassin Béco?

 
Bruxelles a en fait deux canaux. Le canal qui relie Bruxelles à l'Escaut qui a été creusé au XVIe siècle et qui arrivait à l'époque dans le centre-ville à la hauteur de la place de l’Yser et le canal Charleroi ... Bruxelles qui a été inauguré un peu moins de trois siècles plus tard en 1832 et qui s'arrêtait au niveau de l'actuelle place Sainctelette. Il faudra attendre 1905 pour que les deux canaux soient reliés en ligne droite par la construction du bassin de Jonction. Comme le bassin Vergote et le site de Tour & Taxis, la construction du bassin Béco s'inscrit dans un vaste plan de rénovation des installations portuaires de Bruxelles au début du XXe siècle. Il ne prendra son nom définitif qu'en 1929, en l'honneur d'Henri Marie Emile de Béco (1843-1928), gouverneur du Brabant de 1906 à 1928 et à partir de 1909 président de la Société anonyme du Canal et des Installations maritimes de Bruxelles.
Le bassin de 728 mètres de long avait une profondeur de 3,60 mètres, ce qui le rendait inaccessible aux navires de haute mer. Il était cependant suffisamment profond pour le trafic de passagers vers Anvers et Gand et pour les bateaux fluviaux transportant des marchandises, principalement des matériaux de construction. Ces marchandises étaient déchargées sur les quais, d'où partaient des voies ferrées jusqu'à la gare de Tour & Taxis.

© www.garesbelges.be
Les activités économiques autour du bassin Béco ont culminé dans les années 1960 avec des milliers d'employés, mais au tournant du siècle, il est devenu évident qu'en raison de toutes sortes d'évolutions concernant la mobilité, tout le quartier devait être réaménagé. Le Plan Canal, un nouveau plan de rénovation urbaine d'envergure, a vu le jour et la zone autour du bassin Béco a été clairement choisie pour un avenir avec des activités autres que portuaires telles que la culture, les loisirs et l’habitat en raison de sa proximité avec la ville.

Cette transformation est déjà bien engagée

Au niveau de la rive ouest, le site de 45 hectares de Tour et Taxis a été aménagé en zone de bureaux, de logements, de salles événementielles et de parcs. Entre l’avenue du Port et le canal, presque tous les bâtiments restants seront démolis à l'exception de quelques-uns, comme le siège de la KBC et le bâtiment Art Déco qui abrite le siège du Port de Bruxelles, pour faire place au parc Béco avec des terrains de sport, un bac à sable, des tribunes, de grands arbres et un skate park. Ces travaux ont débuté en septembre 2022 et devraient s'achever en 2024.

© www.beliris.be
Du côté sud, toute la zone allant de Sainctelette à la place de l’Yser sera rénovée en un seul espace continu. Soulignons aussi à cet endroit l’aménagement d’une passerelle cycliste sur l’axe cyclable Nord-Sud, sous le pont juste à côté du canal, afin d’éviter les nombreux problèmes de circulation.
Le Waterbus et d'autres activités nautiques plus récréatives ont déjà actuellement pris place au bassin Béco avec deux postes d'amarrage. Plusieurs projets résidentiels sur la rive est du bassin Béco sont achevés ou en phase finale (Upsite, Canal Wharf) et au niveau culturel, le nouveau musée Kanal - Centre Pompidou devrait également ouvrir en 2024. La ville va également connaître de profondes mutations avec p.ex. la reconstruction du parc Maximilien. La ville de Bruxelles a également émis récemment le souhait de réaliser une grande piscine extérieure au niveau du quai des Péniches.

© Waterbus
Un autre objectif du Plan Canal est la création de liaisons multifonctionnelles est-ouest avec par exemple la construction du pont Suzan Daniel, servant exclusivement aux transports en commun et à la mobilité douce, et le réaménagement de l’avenue Bolivar. Visuellement aussi la connexion est-ouest pourra par exemple se faire en abaissant les quais du canal à certains endroits afin d’offrir une meilleure transparence visuelle entre les deux rives avec le musée Kanal d’un côté et les nouveaux bâtiments qui remplaceront une partie des bureaux de la KBC sur l’avenue du Port.

Et aujourd'hui?

Les chantiers et plans de réaménagement abondent, mais ces dernières années le bassin Béco et ses quais offrent un spectacle peu attrayant notamment entre Sainctelette et le nouveau pont Suzan Daniel où malheureusement, les rues et les quais sont souvent jonchés de déchets divers. Il n'y a pas de poubelles (sauf une qui déborde), pas de toilettes publiques et les différents services municipaux et régionaux de propreté n’arrivent pas toujours à faire face au manque de sens civique et à ses conséquences, ce qui rend le quartier très peu attractif malgré son grand potentiel. Une grande partie de ces déchets finit dans l'eau à cause du vent. En fonction de la météo, la vue sur le canal n'est pas toujours aussi belle qu’elle devrait l’être malgré les efforts du Port de Bruxelles qui tente avec ses trois bateaux de nettoyage de ramasser les déchets. L'asbl Canal it up, qui propose à des bénévoles de pêcher les déchets avec des kayaks, ne manque jamais de détritus à repêcher sur cette petite zone du canal.

Il y a aussi beaucoup de choses qui n'ont pas leur place sous l'eau. Les pêcheurs à l'aimant retirent de l'eau les objets les plus courants et insolites (vélos, coffres-forts, revolvers, pièces automobiles,...) mais les laissent généralement sur les quais sans qu’ils ne soient systématiquement enlevés par les services de collecte. Il doit également y avoir de grandes quantités de trottinettes électriques au fond du canal. Fin août, un plongeur professionnel, mandaté par la société de location Dott, a sorti, près du pont Sainctelette, pas moins de 25 trottinettes de l'eau en quelques heures.


Également sous la surface de l'eau, mais moins visible, se trouve la pollution due au débordement du déversoir du Paruck. En cas de fortes pluies, les eaux usées mélangées entrent dans le canal par ce déversoir à hauteur de la place Sainctelette.
De tels débordements évitent les inondations dans la ville, mais sont donc responsables d'une diminution temporaire de la qualité de l'eau de la Senne et du canal, ce qui peut parfois entraîner un manque d'oxygène dans l’eau et une mortalité piscicole importante.
S'attaquer à ce problème complexe est l'un des points d'action importants du Plan Régional de Gestion de l'Eau. En cette période de changement climatique accompagné de conditions météorologiques plus extrêmes, la lutte contre les inondations et l'assèchement, en plus d'améliorer la qualité de l'eau et l’intégration des cours d’eau (également du canal) dans la ville, sont une priorité politique.

Un timelapse (effet accéléré sur une grande série de clichés à intervalles réguliers) du bassin Béco entre 1905 et 2030 fournirait des images fantastiques de la façon dont un quartier de la ville peut changer rapidement. Espérons qu'on finira un jour par avoir un bassin Béco où il est effectivement agréable et sûr de flâner sur les bords de l'eau et où tous les atouts de l'eau en ville pourront être mis en avant: fraîcheur dans la ville, mobilité douce le long et sur la voie d’eau (cyclisme, promenades, croisières, le Waterbus, ...), loisirs sur et au bord de l’eau, ...

Coordination Senne
   
 
 

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