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JOURNAL de la SENNE 12 (-> retour vers le sommaire)

En primeur: Bruxelles se mouille en 2011

La Région bruxelloise pense à son eau. Avec un Plan de gestion. Les Bruxellois ont jusqu'à la fin août pour donner leur avis sur une série de mesures sur tous les aspects liés à l'or bleu: les cours d'eau, les robinets, le sol et le port. David Kuborn de Coordination Senne parle de cette nouveauté dans un interview au Bral.

Le gouvernement nourrit de belles ambitions. David Kuborn utilise le mot 'intégré' quand il nous parle du Plan de Gestion de l'Eau (PGE).

'Le PGE doit apporter une réponse à toutes les questions importantes concernant la gestion de l'eau à Bruxelles. Bruxelles est-elle bien protégée contre les inondations ? Quelle est l'importance des eaux de surface à Bruxelles? D'où vient l'eau potable bruxelloise et comment la garder potable? Dans quel état se trouvent nos égouts ? Quel est exactement le coût réel de l'eau? Et comment allons-nous offrir sur le long terme une bonne qualité des eaux de nos cours d'eau, étangs, robinets et canaux?'

'L'eau est un écosystème complexe dont de nombreux composants doivent être gérés. Ceci exige une gestion coordonnée, intégrée, ce qui sera le cas pour la première fois. Le Plan est donc structuré autour de huit axes d'intervention qui englobent toutes les facettes de la gestion de l'eau. Les objectifs sont variés et incluent la qualité et la quantité de l'eau (de la gestion de la nature à la prévention des inondations), les aspects économiques, la durabilité, vivre le long de l'eau, l'eau comme source d'énergie, … Lors de l'élaboration du Plan il a aussi été tenu compte des caractéristiques très spécifiques de Bruxelles comme capitale. On fait ici allusion à son histoire urbaine, sa densité de population et de construction. Et bien sûr, ce Plan répond aux exigences européennes sur la gestion de l'eau.'

Bral: le PGE est composé d'un grand nombre d'objectifs mais ne connaît aucune exigence quant au 'timing', ni quant aux responsables et aux priorités. Cela ressemble plus à un menu de restaurant où la ministre va piocher ses favoris. Mais Bruxelles Environnement prétend que ce Plan est tout à fait réalisable parce que bon nombre d'actions étaient déjà en préparation. Qu'en penses-tu?

CS: mis à part les priorités qui sont listées dans l'annexe opérationnelle du plan, le document ne reprend en effet ni les moyens attribués, ni le timing pour leur réalisation et fait donc penser à une vision intégrale et à long terme pour la gestion de l'eau à Bruxelles. En soi, c'est positif! Mais est-ce suffisant?

Bral: tu laisses ça en suspens. Mais quelles priorités choisirais-tu, David?

CS: je travaille pour Coordination Senne-Coördinatie Zenne qui est une asbl qui regroupe des personnes et des associations qui défendent une gestion intégrée et durable des cours d'eau et de la nature dans le bassin de la Senne.

Le point du plan qui nous touche le plus est donc la création d'une 'Balade Bleue' qui veut relier et mettre en valeur le patrimoine lié à l'eau, son histoire et son futur. Cette revalorisation et (re)découverte du patrimoine bleu de la Région est au centre de nos conférences, débats, promenades… depuis la création de l'asbl. Nous pensons en effet que les cours d'eau dans un environnement urbain ont de multiples rôles à jouer: rôle paysager, fonction sociale, lieux de détente, de découvertes et de rencontres. Lieux par excellence de sensibilisation et d'éducation. Mais ils doivent être réaménagés et remis en valeur bien sûr.

Bral: nous avons depuis 1999 un programme 'maillage bleu' qui vise entre autres à rendre la fonction naturelle à nos cours d'eau. Le PGE reprend cette idée de 'maillage bleu'. Mais y a-t-il des changements visibles sur le terrain après toutes ces années?

CS: plutôt que répondre à cette question, j'invite les Bruxellois à aller se promener le long de la Woluwe, de partir à la découverte de la vallée de la Pede, de longer le Vogelzangbeek, de se promener le long du Geleytsbeek à Uccle ou d'aller découvrir les marais de Jette-Ganshoren. Idéalement, en se faisant accompagner par un guide d'une des associations actives autour de ces cours d'eau. A la vue de tous ces endroits qui ont pu être préservés et qui ont été réaménagés, nul doute que le promeneur pourra répondre à cette question par l'affirmative.

Bral: quel rôle jouera le canal? Deviendra-t-il plus qu'une voie de liaison 'durable'? Le transport via le canal est-il aussi important que le Port de Bruxelles le prétend, tant pour l'environnement que pour Bruxelles?

CS: le slogan simpliste qu'on entend couramment veut que le transport de marchandises par bateau réduise la pollution, les émissions de CO2, et permette une amélioration de la mobilité en évitant la présence de centaines de milliers de camions dans Bruxelles. Ce slogan n'est correct que si les trafics sont à destination ou en provenance de la Région. En effet, en déchargeant à Bruxelles des marchandises qui n'ont pas pour destination finale la Région, on attire dans un environnement urbain des marchandises qui doivent être redistribuée hors de la ville. Cela peut se faire en train, pour autant que la liaison ferroviaire soit assurée, ce qui n'est pas encore le cas, mais plus que probablement en camion. Ainsi on génère des désagréments en termes de congestion urbaine, nuisances pour les riverains, émissions de particules fines... Sachant qu'un bateau de 1350 tonnes transporte l'équivalent de 60 camions, faites le compte! La politique pour le canal doit donc encourager les activités qui utilisent la voie d'eau et dont les marchandises sont à destination ou provenance de la Région. Les autres trafics doivent être évités afin de privilégier d'autres activités comme des bonnes pistes cyclables, des lieux public de rencontres et des espaces verts qui manquent trop cruellement dans cette zone! Ce que nous nommons le 'canal de la Senne' doit devenir la colonne vertébrale du redéveloppement urbain.

Bral: quels sont les recommandations que vous donnez aux personnes voulant formuler des remarques dans le cadre de l'enquête publique?

CS: bruxellois, il vous reste 4 mois pour réagir, proposer, vous indigner, … Nul besoin d'étudier ce document en détail et d'avoir un avis sur chaque point! Ajoutez une idée pour le cours d'eau qui passe à côté de chez vous ou attirez l'attention de l'administration sur une réalité de terrain qui rend une mesure inapplicable. Et communiquez simplement vos remarques à l'administration! Vous pouvez également participer aux Etats Généraux de l'Eau de Bruxelles. Pendant les prochains mois, la région vivra au rythme de l'eau (d'avril à septembre): expositions, promenades, débats, congrès, appel à idées… En participant à ces activités, vous changerez également la vision sur l'eau dans la ville.

Le Plan de Gestion de l'Eau est à l'enquête publique jusqu'au 28 août 2011.
Vous le retrouvez sur le site de Bruxelles Environnement en cliquant ici.

Basé sur un entretien paru dans le magazine 'Alert' de Bral (Brusselse Raad voor het Leefmilieu).



Pour en savoir plus: www.bralvzw.be


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